DANS CE MODULE, LES MEMBRES DES CONSEILS SCOLAIRES VONT EXAMINER :
- Les composantes du leadership éthique
- Les multiples aspects de leur rôle de leaders
- Les concepts clés de la gouvernance des conseils scolaires
INTRODUCTION
Les conseils scolaires ont une longue histoire, marquée au coin de l’efficacité et de la réussite. Les personnes qui assument la charge de conseiller scolaire sont appelées non seulement à maintenir cette tradition démocratique à l’échelon local, mais aussi à l’enrichir. Elles ont la possibilité de laisser un héritage qui contribuera au maintien d’un des meilleurs systèmes d’éducation au monde.
Le système d’éducation est la pierre angulaire d’une société démocratique. La raison d’être des conseils scolaires et de tout le travail qu’ils accomplissent, c’est de renforcer cette pierre angulaire, de veiller à la protéger et à la consolider.
La priorité absolue de tout conseil scolaire est de mettre en place les conditions voulues pour que chaque élève reçoive une éducation de qualité supérieure et soit ainsi en mesure de réussir à l’école et dans la vie. C’est pour cela que chaque conseillère ou conseiller scolaire, sans exception, siège à un conseil scolaire : pour travailler efficacement, au sein d’une équipe, en vue d’atteindre l’objectif moral supérieur du conseil scolaire. C’est l’équipe qui définit ensemble cet objectif, qui est fondé sur la mission de l’éducation financée par les fonds publics. Cet objectif, dont la formulation varie d’un conseil à l’autre, consiste à doter les élèves des compétences, des connaissances et de la confiance nécessaires pour garantir leur réussite à venir, quel que soit leur cheminement individuel.
Dans leur ouvrage The Governance Core, Campbell et Fullan décrivent un engagement envers un impératif moral commun : « Un impératif moral commun – un engagement constant envers l’apprentissage de tous les enfants, sans exception – doit guider le travail de chaque conseil scolaire et celui de chaque membre de la communauté scolaire. […] Lorsque les conseillères et conseillers scolaires, les cadres supérieurs, le personnel, le corps professoral et les parents sont tous animés par ce même grand impératif moral, un conseil scolaire peut obtenir des résultats extraordinaires sur le plan de l’apprentissage, année après année. » Les auteurs indiquent ensuite que cet engagement commun porte sur des principes fondamentaux, dont les suivants :
- Tous les enfants vont réussir; nous ne permettrons aucun écart de rendement.
- Tous les enfants auront des enseignantes et enseignants de qualité.
- Tous les enfants auront un milieu d’apprentissage sain et sécuritaire.
Tout en poursuivant l’objectif moral de l’éducation, les systèmes scolaires catholiques et ceux de langue française incorporent à leurs missions respectives les droits constitutionnels particuliers reconnus à leurs électeurs. Les systèmes catholiques de langue française et de langue anglaise cherchent à appuyer des communautés confessionnelles au sein desquelles l’identité religieuse fait partie intégrante de la mission de chaque conseil. Dans les systèmes scolaires de langue française, tant public que catholique, l’amélioration et la transmission de la langue et de la culture françaises font partie intégrante de la mission de chaque conseil.
Les quatre systèmes scolaires incluent dans l’énoncé de leur mission un engagement à répondre aux besoins de la population hautement diversifiée de l’Ontario, ce qu’illustre la Stratégie d’équité et d’éducation inclusive du gouvernement provincial.
LES COMPOSANTES DU LEADERSHIP ÉTHIQUE
Individuellement, chaque conseillère ou conseiller doit concilier deux rôles : représenter les électeurs de sa circonscription, et être membre de l’organisme de gouvernance qui prend les décisions dans le conseil scolaire. Collectivement, le conseil élu doit aussi tenir compte à la fois des intérêts des communautés locales, des intérêts plus vastes de la province, ainsi que du contexte législatif qui régit le fonctionnement du conseil scolaire.
Il importe donc que chaque membre du conseil sache clairement quelles sont ses aspirations et ses valeurs personnelles. Pour cela, il faut commencer par réfléchir sur soi-même, ce qui se fait parfois dans le cadre de processus officiels comme l’autoévaluation du conseil. Chaque membre du conseil doit se demander quel rôle il joue en vue de :
- Créer un climat qui favorise l’innovation et la prise de risques
- Bâtir une équipe solidaire et motivée
- Partager le pouvoir et l’information tout en demeurant responsable
- Améliorer ses aptitudes au leadership
Un élément qui ressort clairement dans toutes ces questions, c’est que le leadership, ce n’est ni l’affaire d’une seule personne ni une question de style. En fait, le leadership éthique tient beaucoup plus à la façon dont nous respectons les autres et cultivons nos relations avec eux en vue du bien commun. Comment passer du « je » au « nous »? Comment faire en sorte que le travail accompli par l’ensemble du conseil élu ait beaucoup plus de valeur que ce que pourraient accomplir isolément tous ses membres?
La liste de questions ci-dessus fournit un cadre comprenant cinq pratiques de leadership :
- Être un modèle accessible
- Inspirer une vision partagée
- Remettre en question le statu quo
- Mobiliser dans l’action
- Encourager la compassion et la sensibilité
Ce cadre d’action peut s’appliquer de plusieurs façons particulières dans un conseil scolaire.
Être un modèle accessible
Les conseillères et conseillers apportent au conseil leurs valeurs, leurs convictions, leurs forces et leurs faiblesses personnelles. Leur façon d’exprimer leur point de vue et de se comporter au cours des réunions et dans leurs rapports quotidiens est conforme à leurs valeurs et à leurs convictions. En participant régulièrement à des conversations sur l’éthique, les valeurs et la façon de répondre aux besoins des intervenants, chaque membre du conseil montre qui il est et d’où il vient. Il est alors possible de créer un conseil collégial, dont les membres se comprennent mutuellement et partagent les mêmes valeurs.
Inspirer une vision partagée
Toute personne qui pose sa candidature pour siéger à un conseil scolaire le fait pour apporter des changements positifs dans la vie des jeunes et des familles que le conseil est appelé à servir. L’élan initial peut être de nature très générale – comme une passion pour l’amélioration de l’éducation publique – ou très particulière – comme une opinion sur la façon dont il faut offrir les services d’éducation de l’enfance en difficulté. Dans les deux cas, la personne souhaite améliorer les choses. Sa tâche de leader consiste à exprimer sa vision, à décrire comment celle-ci va améliorer les choses et, au moyen d’un dialogue authentique, à amener ses collègues, le personnel du conseil scolaire et la communauté à partager sa vision.
Remettre en question le statu quo
Cette compétence de leadership consiste à faire preuve d’ouverture devant l’innovation, à examiner diverses approches, à chercher avec curiosité des solutions de rechange et à remettre en question tout énoncé du genre : « C’est ainsi que nous avons toujours fait les choses ». En demandant « Quoi de neuf? », « Quoi d’autre? » ou « Quoi de mieux? », les conseillères et conseillers peuvent ouvrir de nouvelles voies. Cette attitude peut créer des risques et donner lieu à des erreurs et à des désaccords, mais toujours dans un climat de confiance et d’ouverture. Il importe de laisser place à l’expression d’opinions divergentes. Cela permet d’éviter que des gens aient l’impression d’avoir été mis en échec sans avoir pu faire valoir un point de vue différent, et aussi de respecter les droits de la personne, qu’ils soient individuels ou collectifs.
Mobiliser dans l’action
Les leaders éthiques ne sont pas gouvernés par leur ego. Ils voient au-delà d’eux-mêmes et se concentrent sur la réussite de leur organisation ou de leur communauté. Ils cherchent à favoriser des relations, à bâtir des équipes et à fournir aux gens des moyens d’action. « Les leaders travaillent pour que les gens se sentent forts, à la hauteur de la tâche et engagés. Ils leur permettent d’agir non pas en conservant jalousement leur pouvoir, mais plutôt en le cédant à autrui. Les leaders exemplaires renforcent la capacité de chacun de tenir ses promesses. Lorsque les gens jouissent de la confiance de leurs leaders et ont plus de latitude, plus de pouvoirs et plus de renseignements, ils ont plus de chances d’utiliser leur énergie pour obtenir des résultats extraordinaires. »
La pensée générative
La pensée générative aide les gens à mettre en question des hypothèses, à déterminer la faisabilité d’idées et à reconnaître les obstacles et les occasions. On peut la résumer comme suit :
- Une perspective différente sur le fonctionnement des organisations – Les organisations ne voyagent pas en ligne droite de leur vision à leur mission, leurs buts, leur stratégie et sa mise en œuvre.
- Une définition différente du leadership – Les leaders permettent aux organisations de faire face à des problèmes complexes et riches de valeurs, auxquels il n’y a pas de bonne réponse ou de solution parfaite.
- Un état d’esprit différent – Au-delà du rôle fiduciaire et du rôle stratégique, la gouvernance est considérée comme un leadership efficace.
- Un rôle différent – Le conseil devient un actif qui crée une valeur ajoutée pour les intervenants.
- Une façon de penser différente – En plus d’être logique et linéaire, le conseil est inventif et s’amuse intellectuellement.
- Une conception différente du travail – En plus de problèmes techniques, le conseil s’occupe de problèmes d’un ordre supérieur, et il pose des questions qui sont plus catalytiques qu’opérationnelles.
- Une façon de procéder différente – Le conseil compte sur des retraites, un travail d’équipe, de bonnes discussions et une autoévaluation effectuée en collaboration et liée à l’apprentissage organisationnel.
Encourager la compassion et la sensibilité
À force de travailler en équipe, les conseillères et conseillers en viennent à connaître et, dans une large mesure, à partager les valeurs et les convictions de leurs collègues. Même s’ils ne sont pas du même avis que ces derniers, ils ont appris comment bien travailler avec eux. Ils savent quels progrès vont les stimuler et quels obstacles vont les décourager. Un leader éthique est conscient de l’impact des événements sur ses collègues; il sait dire merci, célébrer les petites réussites et les grandes victoires, et faire preuve d’empathie dans les temps difficiles. Ainsi, il crée une capacité d’action collective et met en place les conditions voulues pour la collaboration.
Dans Les conseils scolaires performants et leur leadership (2017), Leithwood parle des ressources personnelles en leadership. Il s’agit des qualités et des traits de caractère qui sont mis en évidence lorsque les pratiques de leadership sont appliquées avec une efficacité maximale. Bien que toutes ces ressources personnelles soient essentielles au travail des conseillères et conseillers scolaires, la proactivité et la pensée systémique comptent parmi celles qui sont les plus difficiles à utiliser par les personnes ayant des fonctions de gouvernance. La proactivité est la capacité de stimuler, de gérer ou de surmonter des changements à grande échelle dans des circonstances complexes. La pensée systémique permet de développer une compréhension stratégique des relations denses, complexes et étroites entre les divers éléments d’une organisation, dans le cadre d’une sage gestion en vue d’un état futur désiré.
QU’EST-CE QUE LA GOUVERNANCE?
Le conseil élu est responsable de la réussite de l’organisation pour ce qui est d’accomplir sa mission. Il s’acquitte de cette responsabilité en assurant une surveillance, en fournissant une orientation et en prenant des décisions dans le cadre d’un processus de gouvernance qui définit des rôles, des relations, des structures et des procédés.
La gouvernance requiert des niveaux d’efficacité très élevés ainsi qu’un engagement de chaque conseillère ou conseiller en matière de leadership éthique, d’apprentissage continu et de perfectionnement à long terme.
Afin d’axer efficacement l’organisation sur sa réussite, le conseil élu assume quatre grands rôles :
- Voir à l’essentiel : le rôle fiduciaire du conseil
- Adopter une vue d’ensemble : le rôle stratégique du conseil
- Assurer l’amélioration continue : le rôle innovateur du conseil
- Promouvoir l’engagement communautaire : le rôle sociétal du conseil
1. Voir à l’essentiel : le rôle fiduciaire du conseil
Le conseil élu a la responsabilité de protéger avec compétence les intérêts, l’image et la crédibilité du conseil scolaire, d’assurer sa viabilité financière et d’agir en conformité avec l’ensemble des lois, des règlements et des politiques qui régissent le fonctionnement du conseil ou sont édictés par le gouvernement.
Pour s’acquitter de ces responsabilités importantes et complexes, les conseillères et conseillers doivent acquérir rapidement de l’expertise dans le secteur de l’éducation, avoir les compétences voulues pour traiter efficacement toute l’information nécessaire pour prendre des décisions, et faire preuve de vigilance quant à l’impact de leurs décisions et de l’évolution des circonstances sur les élèves, leurs familles et la communauté dans son ensemble.
L’exercice de ces responsabilités va bien au-delà d’une simple surveillance fiduciaire. Il requiert l’engagement des leaders afin de déterminer l’efficacité des activités. Il exige qu’on pose des questions comme : « Le budget tient-il compte de nos priorités pour les élèves? Est-il éthique? Que pouvons-nous apprendre de notre vérification? Le conseil traite-t-il son personnel de manière juste et respectueuse? »
Vous trouverez ci-après un aperçu des fonctions d’ordre fiduciaire prévues par la Loi sur l’éducation de l’Ontario. Des renseignements plus détaillés sur ces responsabilités sont fournis dans d’autres modules de perfectionnement professionnel ainsi que dans le guide de chaque association de conseils scolaires intitulé Une gouvernance efficace.
Les vastes responsabilités générales des conseils scolaires ont été énoncées dans la Loi de 2009 sur le rendement des élèves et la gouvernance des conseils scolaires, qui a modifié la Loi sur l’éducation de l’Ontario. Aux termes de l’article 169.1 de la Loi de l’éducation, tout conseil scolaire doit :
- Promouvoir le rendement des élèves et leur bien-être
- Veiller à la gestion efficace des ressources du conseil
- Offrir des programmes d’enseignement efficaces et appropriés à ses élèves
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Élaborer et maintenir des politiques et des structures organisationnelles qui répondent aux objectifs suivants :
- Promouvoir les objectifs du conseil
- Encourager les élèves à poursuivre leurs objectifs en matière d’éducation
- Surveiller et évaluer l’efficacité des politiques élaborées par le conseil du point de vue de la réalisation de ses objectifs ainsi que l’efficience de la mise en œuvre de ces politiques
- Élaborer un plan pluriannuel visant à atteindre les objectifs du conseil
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Examiner annuellement le plan avec le directeur de l’éducation du conseil ou avec l’agent de supervision qui en exerce les fonctions, à l’égard de ce qui suit :
- L’exercice des fonctions que lui attribuent la Loi sur l’éducation, les politiques ou lignes directrices établies en vertu de celle-ci ou les règlements, y compris les fonctions prévues par le plan pluriannuel
- L’exercice des autres fonctions que lui attribue le conseil
Chaque conseil scolaire délègue bon nombre de ces responsabilités à sa directrice ou son directeur de l’éducation.
Le conseil élu veille donc à la mise en place de services et de programmes qui revêtent une importance cruciale pour les élèves, leurs familles et la communauté dans son ensemble. La possibilité stimulante qui s’offre à lui consiste à aller au-delà de la surveillance et de la conformité pour penser l’avenir d’une manière proactive et visionnaire, en favorisant une véritable participation des élèves, du personnel, des parents et de la communauté ainsi qu’en renforçant continuellement la confiance de la population dans l’éducation financée par les fonds publics.
2. Adopter une vue d’ensemble : le rôle stratégique du conseil
En vertu de la Loi sur l’éducation, chaque conseil scolaire doit établir un plan stratégique pluriannuel dont la durée doit être d’au moins trois ans. Ce plan vise à aider le conseil à se fixer des priorités et des objectifs stratégiques à long terme. Pour qu’il fixe des objectifs clairs et qu’il soit efficace, ce plan pluriannuel doit être fondé sur des données probantes. Il importe que les membres du conseil utilisent un processus fondé sur la collaboration à toutes les étapes de son élaboration, afin que tout le monde se sente partie prenante au plan et responsable de sa réussite.
Le plan stratégique pluriannuel est un document de vision et de politique qui définit l’orientation du conseil scolaire. Il constitue un outil de bonne gouvernance et joue un rôle fondamental en vue de renforcer la confiance du public envers le conseil scolaire, non seulement pour protéger les écoles, mais aussi pour veiller à ce qu’elles offrent un milieu d’apprentissage basé sur la bienveillance, l’équité, l’innovation et la flexibilité. Tout en faisant de leur mieux pour offrir de la stabilité, les écoles s’efforcent aussi de s’adapter aux besoins changeants et aux réalités de la société. Les plans opérationnels et les plans d’amélioration préparés par la direction de l’éducation et les cadres supérieurs reposent sur le plan stratégique pluriannuel et déterminent les modalités de sa mise en œuvre.
Un plan stratégique solide et mûrement réfléchi est fondé sur les leçons tirées de l’expérience et non sur ce qui s’est fait dans le passé. Un bon plan pluriannuel est un moteur de changements positifs au sein du conseil scolaire. Les conseillères et conseillers doivent faire preuve de détermination lors de l’élaboration de ce plan en vue de répondre aux besoins de tous les élèves et de s’adapter à l’évolution des communautés. Ils doivent faire preuve de leadership et d’initiative et travailler en étroite collaboration avec les familles, les élèves, le personnel et les membres de la communauté. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez consulter le document Planification stratégique pluriannuelle : Guide à l’intention des conseillères et conseillers scolaires.
En adoptant une pensée de haut niveau et en posant des questions génératives, le conseil élu peut définir clairement ce qu’il souhaite accomplir et comment il compte y parvenir.
Voici des exemples de questions génératives qui pourraient se révéler utiles :
- Quelle est la question qui, si l’on y répondait, pourrait changer le plus l’avenir de notre conseil?
- Qu’est-ce qui est important pour nous dans notre travail, et pourquoi?
- Quelles difficultés et quelles possibilités notre travail comporte-t-il?
- Qu’avons-nous appris jusqu’à maintenant, et qu’avons-nous encore besoin d’apprendre afin de nous améliorer?
- Quelles hypothèses avons-nous besoin de vérifier ou de mettre en question?
- En tant que membres de notre conseil, qu’est-ce qui a une signification réelle pour nous? Qu’est-ce qui nous surprend? Qu’est-ce qui nous interpelle?
- Que faudrait-il faire pour créer et promouvoir un changement sur cette question?
- Si nous étions entièrement certains de réussir, quelles mesures audacieuses pourrions-nous choisir de prendre?
- Comment pouvons-nous nous aider mutuellement à passer aux prochaines étapes? Quelle contribution particulière chacun de nous peut-il apporter?
Pour accomplir ce que le conseil élu a choisi de faire et pour donner suite à son plan, il faut des leaders que Michael Fullan qualifie de résolus :
« Les écoles, les conseils de district et, plus globalement, les systèmes scolaires doivent avoir des leaders résolus qui gardent le cap, surtout lorsque les conditions sont difficiles, et qui amènent les gens qui les entourent à faire preuve de la même résolution. […] C’est un travail difficile qui exige de la persévérance, mais qui n’est pas trop complexe. Il faut être résolu au début, lorsque les idées nouvelles rencontrent beaucoup de résistance, et il faut le rester ensuite pour tirer parti des succès obtenus. »
Dans son rôle stratégique, le conseil élu doit aussi déterminer comment il va s’acquitter de ses responsabilités envers les élèves, le personnel, les parents, la communauté ainsi que le gouvernement provincial. En répondant aux questions ci-dessus, le conseil n’aura décrit qu’un aspect de la situation, en dressant l’état des lieux et en indiquant les résultats escomptés; il doit aussi déterminer quand il aura atteint ces résultats et mettre en place des jalons pour mesurer objectivement les progrès réalisés pour les atteindre. Pour qu’il y parvienne, Michael Fullan suggère l’approche suivante :
« La responsabilisation est nécessaire pour garantir au public que le système est entre bonnes mains et qu’il progresse de manière satisfaisante, mais elle l’est aussi pour que les exécutants sachent dans quelle mesure leur travail porte fruit et pour leur donner la rétroaction et l’aide dont ils ont besoin pour continuer de progresser. Ce qui nous intéresse ici, c’est ce qui permet effectivement de faire avancer tout le système – pas ce qui devrait fonctionner, mais ce qui fonctionne dans les faits. Fondamentalement, la responsabilisation intelligente consiste à mettre en place des règles qui sont à la fois strictement suivies à l’interne et imposées de l’extérieur. »
Le conseil élu doit approuver un cadre de responsabilisation intelligente qui lui permet en permanence de surveiller les progrès accomplis, d’analyser l’information reçue et de rendre compte des résultats obtenus à ses intervenants.
Pour exercer son rôle stratégique, le conseil doit :
- Mener des consultations internes et externes
- Examiner l’environnement interne et externe pour déceler les problèmes
- Étudier les rapports concernant les résultats obtenus
- Animer des discussions et dialoguer
- Développer sa pensée stratégique
- Envisager des options stratégiques
- Faire participer les intervenants, notamment grâce à des débats ouverts
- Se renseigner en tenant compte des forces des personnes qu’il consulte
- Adopter des cadres d’évaluation
Les conseils élus ne se contentent plus de surveiller les systèmes scolaires en se bornant à leurs fonctions fiduciaires; ils sont des leaders en matière d’éducation publique dans leurs communautés et à l’échelle provinciale. Ils assument la responsabilité de mettre en place dans leur district les conditions voulues pour que les élèves répondent à des normes de rendement élevées, dans des milieux d’apprentissage qui assurent leur sécurité et favorisent leur bien-être. Pour y parvenir, chaque conseil élu doit comprendre les enjeux en profondeur, prévoir les ressources nécessaires et favoriser l’adoption, dans le système scolaire, d’une culture qui appuie toutes les personnes chargées d’améliorer le rendement et le bien-être des élèves. Il doit énoncer sa mission éducative et mobiliser l’appui de la population ainsi que les ressources nécessaires pour remplir cette mission.
3. Assurer l’amélioration continue : le rôle innovateur du conseil
En matière d’amélioration continue, le conseil élu fait preuve de créativité et d’innovation et utilise la pensée générative afin que le conseil scolaire et l’ensemble du système scolaire restent toujours au diapason d’un monde en constante mutation. Il adopte une perspective à long terme, faisant appel à une réflexion collective et à un dialogue réfléchi, afin de bien saisir la situation actuelle, de suivre les faits nouveaux et de déterminer comment il peut être un leader efficace dans ce contexte.
« Les leaders qui réussissent sont animés par l’idéal de créer une société plus juste et plus prospère et disposent de stratégies propres à y parvenir. Comme ce but est crucial et qu’ils promettent sa réalisation concrète, les leaders forts ne perdent jamais espoir – même si, surtout dans les débuts, la frustration de ne pas aboutir peut être terriblement décourageante. »
L’amélioration continue va au-delà d’une gestion de qualité. Il s’agit moins d’employer des techniques et des outils pour analyser les problèmes et trouver des solutions que d’instituer une culture qui cherche consciemment et continuellement des moyens plus efficaces et plus créatifs pour évoluer. Un conseil scolaire efficace ne souhaite pas être dans la moyenne : il veut être le meilleur. Il cherche à encourager l’expérimentation et l’innovation, à tester de nouvelles idées et à continuer de les appuyer même s’il survient des échecs à cette étape. En tant que leaders, les membres du conseil doivent non seulement être ouverts aux idées qui leur sont présentées par le personnel, mais aussi faire preuve d’autocritique face à leurs propres préjugés, idées et façons de faire ainsi qu’à la routine où ils pourraient s’enliser. L’ordre du jour du conseil est-il dominé par des questions de routine, ou montre-t-il plutôt que le conseil favorise la réflexion et la planification qui produisent l’innovation? De quels points qui y figurent pourrait-on dire qu’ils visent à permettre aux écoles de rester au diapason de notre monde en mutation rapide? Les processus de gouvernance en vigueur permettent-ils de repérer et d’éliminer les principaux obstacles systémiques touchant les élèves, les familles et le personnel?
Pour être en mesure de s’améliorer continuellement, il faut adopter une façon de penser et d’agir qui ne se contente jamais du statu quo. Le conseil élu remet en question les pratiques en vigueur non pas pour y trouver des défauts ou pour tomber dans la microgestion, mais plutôt pour stimuler une pensée qui amène à adopter les stratégies les plus efficaces. Il va de soi que la force d’une organisation réside dans les personnes qui y travaillent, mais quelles possibilités cela offre-t-il aux conseils scolaires? Par exemple, la culture favorise-t-elle une perception commune, parmi les membres du personnel, du but de leur travail et de la façon dont chacun d’eux joue un rôle essentiel afin de réaliser les objectifs du conseil?
Lorsque le conseil a des objectifs clairs et que tous savent bien comment ils contribuent à leur réalisation, cela permet d’établir des rapports de collaboration et favorise un climat au sein duquel un rendement de haut niveau est valorisé et célébré.
Le fait d’axer le fonctionnement des conseils scolaires sur l’amélioration continue crée une dynamique qui favorise :
- La pensée générative
- Un leadership contextuel et efficace
- Le dialogue et l’ouverture
- La valorisation de la diversité
- Les questions hypothétiques (« Que se passerait-il si…? »)
- La pensée non linéaire, divergente, créative et hors des sentiers battus
- La recherche et l’exploration de nouveaux concepts
- L’élaboration de scénarios
- Des échanges sincères et non routiniers
4. Promouvoir l’engagement communautaire : le rôle sociétal du conseil
La promotion de l’engagement communautaire exige un engagement profond et sincère en matière de collaboration et d’éthique : d’abord parmi les conseillères et conseillers, afin de montrer que le conseil élu est conscient de sa place dans la société; puis, dans un contexte plus large, afin d’agir de concert avec toute la communauté, y compris d’autres groupes et organisations ayant un objectif commun. Ce rôle encourage les conseils scolaires à prendre conscience et à tirer parti de leur interconnexion et de leur interdépendance avec d’autres organisations. Cela est particulièrement important pour les conseils scolaires de langue française, dont la capacité de renforcer l’identité linguistique et culturelle francophone est accrue par l’établissement de partenariats solides dans toute la communauté de langue française, ce qui favorise l’épanouissement durable de tous les secteurs de cette communauté. Tous les conseils doivent offrir de véritables occasions d’engagement communautaire afin d’exercer un leadership éthique. Il s’agit d’écouter et d’amplifier les voix de la communauté – surtout celles des groupes historiquement marginalisés – et de veiller à la mise en place de processus afin que les décisions et les structures de gouvernance du conseil tiennent compte des points de vue de la communauté.
Les conseils scolaires et les écoles ne fonctionnent pas en vase clos. Ils sont étroitement liés à la vie des familles, des communautés locales et des autres organisations qui sont actives dans ces communautés. Ils sont aussi liés au gouvernement provincial, grâce à une structure de responsabilisation mutuelle, ainsi qu’à la nation et au monde entier, car il leur incombe de veiller à ce que les diplômés soient dotés des compétences voulues pour réussir dans l’économie mondiale, ainsi que des valeurs et du caractère qui leur permettront d’apporter une contribution à la société civile.
Quelles relations de collaboration un conseil élu doit-il établir?
D’abord et avant tout, avec les familles
La participation des parents à l’éducation des enfants est directement liée à la réussite scolaire de ces derniers. Les parents (y compris les tuteurs et toutes les personnes qui s’occupent des enfants et s’intéressent à leur éducation) peuvent ajouter beaucoup aux efforts de l’école lorsqu’ils savent ce qui s’y passe et qu’ils ont une idée claire des buts éducatifs du conseil scolaire. Leur influence à cet égard a des répercussions qui se font sentir bien au-delà de l’école même, jusque dans toute la communauté. Un conseil scolaire efficace crée une structure expressément conçue pour offrir aux familles la possibilité de participer vraiment à ses processus de consultation et de gouvernance.
Avec les autres niveaux de l’administration locale et les organismes communautaires
De multiples interactions sont possibles dans les communautés incluses dans les limites d’un conseil scolaire. Les partenariats et les actions concertées, notamment avec les municipalités et les organismes communautaires, permettent non seulement de réaliser des économies d’échelle, mais aussi de renforcer considérablement la solidarité communautaire. Ces interactions donnent aussi au conseil élu l’occasion d’entendre le point de vue des électeurs.
Un résultat essentiel de la collaboration est que tous perçoivent mieux le rôle de l’éducation publique dans la vie de la communauté et savent qu’il est possible de réussir lorsqu’une démarche concertée permet d’atteindre un objectif commun. Un autre résultat positif pourrait être une meilleure compréhension par les membres du conseil des obstacles systémiques touchant divers groupes en matière d’éducation et dans d’autres domaines, ainsi que des moyens permettant de repérer ces obstacles et de les éliminer efficacement.
Avec des partenaires externes et le milieu des affaires
Beaucoup de conseillères et de conseillers ont bien réussi en affaires et font bénéficier le conseil de leur expertise, et il est aussi utile de favoriser la participation de l’ensemble du milieu des affaires. Qu’ils aient ou non des enfants à l’école, les chefs d’entreprise ne peuvent que profiter de la valeur ajoutée à leur communauté lorsqu’il s’y trouve des écoles performantes dont les élèves atteignent des niveaux de rendement élevés. On sait que les écoles sont des établissements publics qui attirent les nouveaux arrivants et veillent à ce que leurs diplômés apportent une contribution productive à l’économie canadienne. Cependant, au-delà de ces considérations pratiques, la plupart des entreprises tiennent à jouer un rôle utile dans les communautés où elles sont établies. Si elles y sont invitées, elles peuvent donner l’avis du milieu des affaires sur la planification stratégique du conseil ou sur d’autres questions d’ordre opérationnel. Comme les conseils scolaires sont tenus de créer des comités de vérification indépendants aux termes de la Loi sur l’éducation, ils doivent chercher des représentants du milieu des affaires pour y siéger. Pour nouer ces nouvelles relations, il leur faudra faire preuve d’ouverture d’esprit quant à l’examen de leurs pratiques, et bien écouter les conseils qu’ils recevront.
Avec les dirigeants politiques
Les citoyens de la communauté élisent également des députés à l’Assemblée législative de l’Ontario et au Parlement fédéral. Bien que l’éducation soit de compétence provinciale, certains domaines de compétence fédérale ont une incidence sur les écoles. C’est notamment le cas de questions importantes comme l’éducation des Autochtones, l’immigration, le droit d’auteur et la taxe de vente harmonisée. Toutefois, c’est le gouvernement provincial qui exerce la plus grande influence sur les conseils scolaires, comme le montrent à l’évidence les lois, les politiques et les règlements qui doivent être mis en œuvre dans les écoles, le mode de financement de ces dernières et, dans une grande mesure, le mode de gouvernance des conseils scolaires. Un conseil scolaire soucieux de réussite établit donc des relations de collaboration avec les dirigeants politiques, tant au niveau fédéral qu’au niveau provincial.
Bon nombre de ces politiciens se sont fait élire pour des raisons qui n’ont pas grand-chose à voir avec l’éducation. Il appartient aux membres de chaque conseil scolaire, dans le cadre d’un plan de communications bien conçu, de les tenir au fait des enjeux qui touchent les écoles et de leur donner une vue d’ensemble du secteur de l’éducation dans la province. En agissant ainsi à l’échelon local, les conseillères et conseillers scolaires sensibilisent les députés et les ministres provinciaux qui sont appelés à voter les lois régissant les conseils scolaires, et ils peuvent en profiter pour faire valoir les avantages de l’autonomie de ces derniers. Le conseil élu peut inviter les membres de la classe politique locale (de tous les niveaux) à discuter de son plan stratégique; il peut les tenir au courant des problèmes particuliers des écoles locales et partager avec eux les bonnes nouvelles touchant la réussite des élèves avant qu’il n’en soit question dans les médias locaux. Les conseils scolaires efficaces reconnaissent publiquement la contribution des dirigeants politiques qui appuient une politique publique progressiste, dont profitent les élèves qui fréquentent leurs écoles.
En résumé
Lorsqu’un conseil élu exerce avec diligence son rôle de promotion de l’engagement communautaire, ses écoles et ses élèves en profitent immédiatement grâce à l’appui et à la reconnaissance de la population, sans parler d’autres ressources sociales, émotionnelles et expérientielles. Le rendement des élèves peut alors atteindre des niveaux inaccessibles à des conseils qui fonctionneraient en vase clos.
Les conseils efficaces font des efforts délibérés et continus pour mettre en place des protocoles et des mécanismes afin de connaître l’opinion de la communauté et de mobiliser celle-ci en faveur des écoles publiques. La stratégie consistant à demander l’avis de la communauté, à en tenir compte et à obtenir son appui est efficace pour concilier des intérêts opposés et pour dégager, au sein du système scolaire et dans toute la communauté, un consensus productif qui repose sur l’intérêt supérieur de tous les élèves.
Dans une perspective plus large, en préconisant l’engagement communautaire et la mise en place de partenariats, un conseil scolaire se fait des alliés et accroît la confiance de la population dans l’éducation financée par les fonds publics. Il renforce alors son propre engagement sociétal en soulignant la valeur d’un système d’éducation dynamique et performant qui, en plus de veiller à l’apprentissage des enfants, constitue un facteur de cohésion sociale, d’équité et de prospérité pour l’ensemble de la société.
CONCLUSION
Ce module aide les conseillères et conseillers scolaires à examiner la notion de leadership éthique et son application à leur travail de membres d’un conseil scolaire. Il traite également des rôles complexes et aux multiples facettes que jouent les conseils scolaires et leurs membres pour servir les élèves, les familles et les communautés et pour garantir la réussite future de l’éducation publique en Ontario.
NOTES
Le modèle des rôles de gouvernance est adapté de : Lise Lortie, La gouvernance… un exercice de leadership, Centre canadien de leadership en évaluation (Le CLÉ), 2008.
-
Davis Campbell et Michael Fullan, The Governance Core: School Boards, Superintendents, and Schools Working Together, 2019.
-
James M. Kouzes et Barry Z. Posner, The Leadership Challenge, 2012.
-
Ibid.
-
Kouzes et Posner, op. cit., p. 21. (La section sur le leadership éthique adapte le modèle de Kouzes et Posner à la situation d’un conseil scolaire.)
-
Richard Chait, William Ryan et Barbara Taylor, Governance as Leadership, 2004.
-
Michael Fullan, All Systems Go, 2010.
-
Ibid.
-
Ibid.